Partie 2 Galerie des portraits

Buste d’une inconnue

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Buste d’une inconnue
Buste d’une inconnue
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Buste d’une inconnue
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Buste d’une inconnue
Buste d’une inconnue
Buste d’une inconnue
Date de création
Vers 125 - 135
Matériau
Marbre de Göktepe 3 (Turquie)
Dimensions
H. 47 x l. 36 x P. 32 (cm)
Numéro d’inventaire
Ra 77

Cet élégant buste, d’une finesse de facture et de style peu commune, figure une jeune femme vêtue d’une tunique plissée, boutonnée sur l’épaule droite et recouverte d’un manteau qui vient s’enrouler autour des épaules. La découpe suit la ligne inférieure des seins avant de s’évaser obliquement vers les épaules où une cassure, du côté gauche, a endommagé le drapé. La tête est nettement tournée vers la gauche, le cou est fin et long, le port de tête gracieux. Les yeux, aux globes oculaires larges, sont soulignés par de fins sourcils étirés vers les tempes. La bouche, charnue et délicatement dessinée, présente une lèvre supérieure légèrement retroussée.

La pureté des lignes de ce visage lisse, à l’ovale classicisant, aux yeux et aux sourcils non incisés, fait écho à la finesse avec laquelle les masses capillaires sont traitées. Sur le front, les cheveux, peignés de part et d’autre d’une raie centrale, dégagent complètement les oreilles et sont tirés vers le haut, où les mèches sont rassemblées en trois nattes plates adhérant au crâne. Ces tresses constituent ensuite un épais turban, formé d’un quadruple enroulement, qui vient enserrer l’ensemble de la calotte crânienne. Enfin, deux élégantes boucles en accroche-cœur ornent les tempes et quelques mèches folles ondulent sur la nuque. La facture est remarquable par son emploi quasi exclusif du ciseau droit dans le traitement des yeux comme de la chevelure : le détail de chaque cheveu est obtenu au moyen de très fines incisions, avec une minutie et une sensibilité virtuoses.

La simplicité de cette coiffure se distingue des assemblages aussi variés que raffinés qui caractérisent les portraits féminins de la première moitié du IIe siècle : elle ne comporte ni les cheveux agencés en forme de diadème bouclé de l’époque trajanienne, ni les édifices capillaires ornés d’ondulations frisées au fer popularisés par les effigies de la pleine période antonine. Le portrait officiel des dames de la Maison impériale constitue, on le sait, un référent obligé pour l’encadrement chronologique des nombreux visages anonymes qui nous sont parvenus ; le point de confrontation le plus probant est, en l’occurrence, constitué par certains portraits de l’impératrice Sabine ou très proches de ces derniers – notamment une statue en Sabine en Vénus Genetrix, inv. 24, musée d’Ostie, Lalupa / Wikimedia Commons CC BY-SAVénus Genetrix du collège des Augustales d’Ostie, d’identification controversée.

Dans le domaine du portrait privé, l’effigie de Chiragan appartient à une série cohérente d’œuvres datables entre le règne d’Hadrien et le début de l’époque antonine : les variantes concernent la position plus ou moins haute du bandeau tressé sur le front ou autour de la tête. En réalité, la comparaison avec les exemplaires issus de l’Urbs ou de ses environs permet de mesurer l’extraordinaire qualité du buste de Chiragan, indéniablement issu d’un atelier de haut niveau. Il n’est pas exclu qu’il figure un personnage éminent de l’aristocratie romaine du temps.

De fragiles indices permettent d’en préciser quelque peu la datation : en raison de l’absence de creusement de la pupille et de l’iris, elle ne saurait être repoussée bien au-delà de 130, quoique le critère ne soit pas infaillible ; quant à la physionomie, empreinte d’une grâce non dénuée d’une certaine gravité, elle achève de rattacher cette œuvre à cet horizon chronologique et fait d’elle un très bel exemple de « visage d’époque » hadrianique, proche de celui des princesses divinisées de la famille des Ulpii, de Plotine à Marciana, respectivement épouse et sœur de l’empereur Trajan.

D’après E. Rosso 2012, Les portraits romains , 1 : Le siècle des Antonins, 1.2 (Sculptures antiques de Chiragan (Martres-Tolosane), Toulouse, p. 171-183.

Bibliographie

  • Balty, Cazes, Rosso 2012 J.-C. Balty, D. Cazes, E. Rosso, Les portraits romains, 1 : Le siècle des Antonins, 1.2 (Sculptures antiques de Chiragan (Martres-Tolosane), Toulouse
    .
    p. 47-48, fig. 46-48, p. 172, 174-176, 178, 181-182, fig. 101-104, 107, 110-112
  • Cazes et al. 1999 D. Cazes, E. Ugaglia, V. Geneviève, L. Mouysset, J.-C. Arramond, Q. Cazes, Le Musée Saint-Raymond : musée des Antiques de Toulouse, Toulouse-Paris
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    p. 133
  • Du Mège 1835 A. Du Mège, Description du musée des Antiques de Toulouse, Toulouse
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    no 204
  • Du Mège 1828 A. Du Mège, Notice des monumens antiques et des objets de sculpture moderne conservés dans le musée de Toulouse, Toulouse
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    no 142
  • Espérandieu 1908 É. Espérandieu, Recueil général des bas-reliefs de la Gaule romaine, 2. Aquitaine, Paris
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    no 989
  • Joulin 1901 L. Joulin, Les établissements gallo-romains de la plaine de Martres-Tolosane, Paris
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    no 289
  • Massendari 2006 J. Massendari, La Haute-Garonne : hormis le Comminges et Toulouse 31/1 (Carte archéologique de la Gaule), Paris
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  • Musée Saint-Raymond 2011 Musée Saint-Raymond, L’essentiel des collections (Les guides du MSR), Toulouse
    .
    p. 42-43
  • Musée Saint-Raymond 2011 Musée Saint-Raymond, L’image et le pouvoir : le siècle des Antonins. Exhibition, Musée Saint-Raymond, Toulouse, 19 November 2011 - 18 March 2012, Toulouse
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    p. 84-85
  • Rachou 1912 H. Rachou, Catalogue des collections de sculpture et d’épigraphie du musée de Toulouse, Toulouse
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    no 77
  • Roschach 1892 E. Roschach, Catalogue des musées archéologiques de la ville de Toulouse : Musée des Augustins, Musée Saint-Raymond, Toulouse
    .
    no 77

Pour citer cette notice

Capus P., "Buste d’une inconnue", dans Les sculptures de la villa romaine de Chiragan, Toulouse, 2019, en ligne <https://villachiragan.saintraymond.toulouse.fr/ark:/87276/a_ra_77>.