Hercule et la reine des Amazones
- Date de création
- Fin du IIIe siècle
- Matériau
- Marbre de Saint-Béat (Haute-Garonne)
- Dimensions
- H. 146 x l. 66 x P. 19 (cm)
- Numéro d’inventaire
- Ra 28 h
Neuvième des douze Travaux, cette épreuve oblige Hercule/Héraclès à partir vers l’Asie Mineure, sur les terres d’Hippolyté, reine des Amazones. C’est en Cappadoce que celle-ci guidait le légendaire peuple de guerrières cavalières. Le mythe fait écho à l’inversion des rôles de la guerre et du pouvoir, traditionnellement garantis par les hommes mais singulièrement endossés par des femmes dans ces contrées ; une inversion synonyme du grand chaos qui régnait en Orient, selon les Grecs C. Jourdain-Annequin, « Héraclès en Occident », C. Bonnet, Academia belgica, École française de Rome (éd.), Héraclès, d’une rive à l’autre de la Méditerranée : bilan et perspectives. Actes de la table ronde de Rome 15-16 septembre 1989 (Etudes de philologie, d’archéologie et d’histoire anciennes), Brussels-Rome, 1992, p. 263‑291, p. 173..
Le voyage d’Hercule vers l’embouchure du fleuve Thermodon (Cappadoce) trouve son fondement dans la ceinture en or que possédait Hippolyté. Convoitée par la fille d’Eurysthée, le héros reçut l’ordre de récupérer le précieux accessoire. Ainsi fut-il dans l’obligation de neutraliser l’hégémonie de ce peuple de femmes, tuant en combat singulier les douze Amazones les plus éminentes, avant de se voir remettre la ceinture. Selon Apollodore, Héra, déesse jalouse et furieuse, aurait fait courir le bruit qu’Hercule voulait enlever la souveraine. Furieuses, les Amazones auraient alors engagé le combat contre le héros, une bataille qui s’acheva par la mort d’Hippolyté Pseudo-Apollodore, Bibliothèque, 2nd century (circa), II, 5, 9..
Sur le relief, d’Hercule ne reste qu’un pied. La cavalière, que celle-ci incarne la reine ou bien, plus génériquement, une Amazone, est quant à elle bien conservée. La guerrière orientale est coiffée du bonnet scythe, en peau de renard, l’alopekis. Elle brandit de la main droite une bipenne, hache à deux tranchants, tandis qu’on reconnaît, en bas à droite, la pelta, bouclier distinctif des Amazones, léger et maniable, en forme de croissant de lune, caractéristique de l’armement des peuples orientaux. Sa tête ressemble beaucoup à celle d’Attis, sculptée sur l’un des médaillons des dieux qui furent peut-être associés à ce cycle.
Conformément aux autres reliefs des douze Travaux, le dynamisme de la scène est exprimé par un débordement des personnages et des objets sur le cadre. La nervosité des mouvements de la lutte est également démontrée, pour cette scène en particulier, par le raccourci du cheval dont l’arrière-train déborde en saillie dans l’espace, depuis l’arrière, tandis que la partie antérieure de l’équidé semble pénétrer le champ du panneau, en très bas-relief. Cette technique, bien connue dans le domaine de la sculpture des maîtres de la Renaissance italienne, définie par un terme, schiacciato (« écrasement »), qui en traduit bien l’intention, permet, avec une grande subtilité, d’appréhender la profondeur de champ. La peinture antique avait, de son côté, adapté depuis longtemps ce rendu illusionniste à l’aide d’une perspective atmosphérique monochrome. C’est bien, en l’occurrence, une impression picturale qui se dégage du beau travail en relief de Chiragan.
P. Capus
Bibliographie
- Cazes et al. 1999 D. Cazes, E. Ugaglia, V. Geneviève, L. Mouysset, J.-C. Arramond, Q. Cazes, Le Musée Saint-Raymond : musée des Antiques de Toulouse, Toulouse-Paris. p. 94-95
- Du Mège 1835 A. Du Mège, Description du musée des Antiques de Toulouse, Toulouse. no 167
- Du Mège 1828 A. Du Mège, Notice des monumens antiques et des objets de sculpture moderne conservés dans le musée de Toulouse, Toulouse. no 79
- Espérandieu 1908 É. Espérandieu, Recueil général des bas-reliefs de la Gaule romaine, 2. Aquitaine, Paris. p. 37, no 899, fig. 5
- Joulin 1901 L. Joulin, Les établissements gallo-romains de la plaine de Martres-Tolosane, Paris. no 96 B, D
- Massendari 2006 J. Massendari, La Haute-Garonne : hormis le Comminges et Toulouse 31/1 (Carte archéologique de la Gaule), Paris. p. 251, fig. 127
- Rachou 1912 H. Rachou, Catalogue des collections de sculpture et d’épigraphie du musée de Toulouse, Toulouse. no 28 h
- Roschach 1865 E. Roschach, Catalogue des antiquités et des objets d’art, Toulouse. no 28 f
Pour citer cette notice
Capus P., "Hercule et la reine des Amazones", dans Les sculptures de la villa romaine de Chiragan, Toulouse, 2019, en ligne <https://villachiragan.saintraymond.toulouse.fr/ark:/87276/a_ra_28_h>.